La plus belle saison, dans la plus belle eau…
Certains arbres arborent leurs plus belles couleurs rougeâtres, d’autres sont nus. Les premières gelées nocturnes font leur apparition. Au petit matin une épaisse brume recouvre l’eau du canal, plus chaude que l’air. Les premiers rayons solaires percent au loin, réchauffant ainsi la nature endormie. Aucun bruit ne vient perturber la clémence du jour. En cette saison les promeneurs, si présents en période estivale, ont déserté les lieux…




Préambule

En période hivernale, le métabolisme des carpes ainsi que la quantité de nourriture qu’elles ingèrent quotidiennement sont directement liés à la température de l’eau. Il faut savoir que la température du corps de la carpe est égale à la température de l’eau.

Mais contrairement aux croyances d’antan, les carpes continuent de s’alimenter en plein cœur de l’hiver. Certes elles deviennent beaucoup moins actives et se nourrissent moins lorsque la température de l’eau diminue, mais elles continuent quand même à s’alimenter quotidiennement, par petites quantités…

Température minimum…

Voilà bien la grosse interrogation de la pêche hivernale. Tout d’abord, il faut savoir que lorsque la couche d’eau supérieure est gelée (et donc d’une température inférieure à 0 degré Celsius), la température sous cette couche de glace augmente au travers des différentes couches d’eau. Lorsque la couche supérieure est gelée, la couche d’eau inférieure doit se situer entre 2 et 4 degrés, parfois plus même.

Dans cette fourchette de température, le métabolisme de la carpe est très bas. La carpe se nourrira de quelques appâts, ici et là. Il ne faut pas non plus oublier que la carpe n’a pas d’estomac.


Les bordures du canal étaient gelées lorsqu'elle a saisi ma flottante...



Le transit intestinal se fait simplement par les intestins. La digestion de la carpe est donc en relation avec la température de l’eau. Dans une eau à 22 degrés, la carpe ne prendra que quelques heures pour digérer nos bouillettes, mais il en est tout autrement dans une eau à 4 degrés, où il lui faudra plusieurs jours pour digérer ces quelques bouillettes ingérées.

Personnellement, j’ai déjà pris des carpes dans une eau à 4°. Mais jamais en dessous…


Première étape

S’il est un point auquel il faut vraiment prendre attention l’hiver, c’est bien la localisation. Si durant la période estivale les carpes voyagent beaucoup en quête de nourriture, l’hiver leur comportement est tout autre. Elles se fixent littéralement sur certains secteurs. Trouver ces zones, appelées « postes de tenues », est d’une importance capitale si l’on veut réussir. Tout ça c’est bien beau en théorie, mais comment trouver ces fameux postes ?

Il n’y a malheureusement pas de solutions « magiques » permettant de les trouver au moindre coup d’œil. Le meilleur moyen, c’est d’observer, lignes à l’eau…

L’hiver passé, je me suis fixé comme objectif de trouver cette zone de tenue dans un de mes lieux de prédilection. Au lieu d’amorcer un poste à l’avance, qui n’était d’aucun intérêt ici car mon but était de trouver leur zone d’alimentation, j’ai décider de pêcher les différents «postes types » du lieu. Evitant ainsi les longues lignes droites, j’ai pêché les larges, les postes encombrés, les éboulis rocheux, etc. Je pêchais très large (profondeur différente, types de postes différents), afin de trouver au plus vite ce que je recherchais. Après plusieurs pêches, où les capots furent légion, j’ai enfin trouvé ce que je recherchais.

Ce poste ne payait pourtant pas de mine, contrairement aux autres pêchés précédemment. Et pourtant, lors de ma première pêche, j’y ai enregistré plusieurs départs, alors qu’il gelait à pierre fendre et que je n’y avais jamais amorcé la moindre bouillette !

Lors des semaines suivantes, je suis retourné pêcher ce poste à plusieurs reprises, sans enregistrer le moindre capot, avec une moyenne de 3 départs par journée. J’ai même repris à plusieurs reprises les mêmes poissons (jusqu’à trois fois la même commune de 9,5 kg), preuve qu’ils se tenaient bien sur cette zone. Ces résultats étaient plus qu’inespérés pour la saison, quand on connaît ces lieux vastes et peu peuplés.








Trois fois le même poisson, preuve qu'elles affectionnent certaines zones



Montage : Simple mais efficace

Autre fait que j’ai pu observer, les poissons « chipotent » beaucoup plus l’hiver. C’est pour cela qu’il faut mettre tous les atouts de notre côté. J’accorde beaucoup de soin et d’importance à la réalisation de mes montages ainsi qu’à la présentation de l’esche. Il faut savoir que l’eau est beaucoup plus transparente l’hiver, du fait que le gel tue les micros organismes en suspension dans l’eau. Sur le poste dont je fais référence plus haut, on voit le fond dans un mètre d’eau au cœur de l’hiver, alors qu’en plein été ; on ne voit pas dans dix centimètres…

Autant dire que le montage doit être discret. Comme montage « type » j’utilise un mètre de leadcore 45lbs (relié à ma tête de ligne en gros nylon), qui se plaquera sur le fond, rendant le montage indétectable. J’ai recours à un clip plomb en dérivation, qui libèrera le plomb si celui-ci se prend dans une aspérité du fond ou dans un des nombreux obstacles encombrant la berge opposée. Côté bas de ligne, j’utilise soit du fluoro carbone en 0,41mm si le fond est dégagé, soit du nylon Platil marine en 50% si je pêche près d’obstacles, ce qui est bien souvent le cas…

Côté plombs, je descends rarement en dessous de 100 grammes, afin d’être certain de jouir d’un bon auto-ferrage. Côté forme, j’affectionne les plombs plats. Ils tiennent bien le fond lors de mouvements d’eau et garantissent un bon auto-ferrage. Je place bien souvent une petite olivette libre de 10 grammes au dessus de mon leadcore. Lors du lancer, elle coulissera sur ma tête de ligne, rendant ainsi les derniers mètres du piège indétectables. A ce sujet là, voici une petite anecdote qui démontre bien la nécessité d’utiliser un montage adapté.

Début février 2002, je me retrouve au bord d’un petit plan d’eau pas loin de chez moi. Le temps est de saison, grêle et neige fondante sont omniprésentes. Etonnement, j’enregistre rapidement les premières touches. Mais, alors qu’en été les carpes de ce plan d’eau me gratifient bien souvent de « run » en puissance, je n’enregistre que des tirées timides et sans suite. Je ferre dans le vide plusieurs fois d’affilée jusqu’à ce que j’en pique une. Mais, arrivée sur le tapis de réception, je constate qu’elle est piquée dans le flanc. Je remplace alors mon bas de ligne en tresse par un bas de ligne rigide en nylon. Et je place un plomb de 120 grammes, à la place de mon 60. A peine la ligne replacée, qu’elle redémarra. Le poisson était parfaitement piqué dans la lèvre inférieure. Les départs ont continué toute la journée. Je totalisais 17 carpes en fin de journée, ce qui est bien plus qu’en plein été. Et j’étais le seul au bord du plan d’eau…

Winter food…

Concernant les appâts, je reste aussi simple l’hiver que l’été. Je ne vanterai donc pas l’utilisation de stimulateurs d’appétit, de bétaïne, ou d’autres ingrédients plus inutiles les uns que les autres (avis personnel).

Voici deux recettes qui donnent de très bons résultats, été comme hiver. Elles contiennent juste ce qu’il faut, rien de plus, rien de moins…

Mix carné :
-1 part de farine de maïs
-1 part de semoule de blé
-1 part de soja
-1 part de farine de poisson
-1 part de farine de pellets

-6 ml pour 10 œufs de monster crabe Rod hutchinson (ou big carpe)

-2 cuillères à café de sel par kg de mix

-5 ml de sweetener pour 10 œufs (facultatif)

Mix végétal:

-1 part de farine de maïs
-1 part de semoule de blé
-1 part de soja
-1 part de birdfood (pâtée aux biscuits cédé pour oiseaux par exemple)
- deux poignées de graines pour canaris

- 8ml d’arôme scopex Rod hutchinson pour 10 œufs (ou de Fruit bombe bc)

-2 cuillères à café de sel

- 10ml de sweetener pour 10 oeufs (ou autre sucrant naturel)

Concernant le diamètre des appâts, je pêche bien souvent en 14mm voire 16mm. Mais il m’arrive également bien souvent de placer une boule de 30 mm en dehors du coup amorcé…

Stratégies hivernales

Bien plus importante à mes yeux que l’incorporation de produits « dopants » dans mon mix, la stratégie de pêche se révèle très importante en période hivernale. Plus que jamais, du moins dans les lieux très peu rabattus que je pêche, j’ai remarqué que la pêche au spot était la plus adaptée. Bien souvent, je place ma ligne en bordure et amorce précisément une douzaine de bouillettes, le tout agrémenté d’une poignée ou deux de maïs doux. Lorsque je pêche à plus grande distance, j’essaye d’être le plus précis possible avec le cobra.

Lorsque le poisson est vraiment difficile, ou bien lorsque je n’arrive pas à la localiser, je place une canne hors zone amorcée, avec très peu d’amorçage autour. Soit j’y place une flottante de couleur vive bien décollée du fond, soit j’ai recours à une boule dense agrémentée d’une chaussette soluble de micro- pellets…Personnellement, j’ai obtenu de meilleurs résultats avec la « chaussette » qu’avec les flottantes fluorescentes…




Mais n’oubliez pas non plus de varier les présentations. Une présentation que j’affectionne particulièrement l’hiver, c’est le bonhomme de neige (présentation constituée d’une bouillette flottante au dessus et d’une dense en dessous). Additionnée d’une chaussette de pellets, cette présentation est une véritable bombe. Au moindre mouvement d’eau l’appât se trouve en suspension.

Autre présentation très attractive, la bouillette enrobée de pâte crue. Cette pâte a conservé toutes les vertus des arômes et additifs, étant donné qu’elle n’a pas été cuite. Au cours de son immersion, la pâte va se désagréger lentement, marquant ainsi le fond d’un petit tapis de particules…

L’hiver doit rester un plaisir…

Voilà un point que je me dois d’aborder, le confort. En effet, si l’été je ne vois pas d’inconvénients à dormir à la belle étoile, au cul des cannes, il en est tout autre l’hiver. Les départs sont bien souvent moins fréquents, ce qui provoque une certaine passivité du pêcheur. Afin de ne pas prendre froid, même lors d’une pêche d’une journée, il convient de ne pas oublier quelques points. Dès que possible, j’emporte avec moi :

-Abri de type week-end tripper (vérifier au préalablement son étanchéité…)

-Bedchair

-Sac de couchage : investissez dans un sac de qualité, vous ne le regrettez pas ! Si jamais vous n’avez pas de sacs « hiver », enfilez deux

sacs l’un dans l’autre, vous aurez presque aussi chaud !

-Réchaud, afin de pouvoir manger et boire chaud. C’est un must non négligeable quand il gèle à pierre fendre.

-Vêtement chaud, de type « damart » si possible. Rien ne sert de superposer les couches, mieux vaut investir dans de réels vêtements d’hiver (n’hésitez pas à sortir un peu à l’avance les salopettes de ski…)

- Vêtement de rechange, si jamais il vous prenait l’idée d’un bain de minuit…


Pêcher à deux est une bonne alternative l’hiver. L’autre sera ainsi là pour vous remonter le moral en cas de galères. Et puis, il est plus facile d’exploiter une large zone de pêche à deux que seul…

En conclusion, je voudrais insister sur le fait que la pêche est et doit rester une passion avant toutes choses. Si les températures sont vraiment trop basses, ou si vous n’êtes pas des plus motivés, alors mieux vaut rester chez vous bien au chaud, à rouler un stock de bouillettes par exemple.

Par contre, si vous respectez les quelques points que j’ai tenté d’aborder, il vous sera possible de cartonner pendant que d’autres seront de corvée roulage…Personnellement, mon choix est fait, et depuis longtemps .
Publié par Nico le 12-12-2004
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