La malédiction
Il ne faut jamais mettre la charrue avant les bœufs, c’est bien connu.Mais il est toujours plus facile de parler plutôt que d’appliquer à soi-même ces proverbes.
Enfin, en tant que jeune pêcheur à la carpe (jeune par l’expérience, 2 ans et puis 26 ans, mon âge, c’est pas vieux non plus !!) j’avais tendance à privilégier des pêches dans des plans d’eau réputés difficiles au lieu de faire mes premières armes dans des étangs relativement plus accessibles.
Certes, mes premiers cyprins je les ai faits dans des étangs « faciles » à pêcher mais leur poids n’avait jusque-là jamais dépassé les 7.2 kg (score qui me convenait quand même plutôt bien). Malgré tout, je rêvais de carpes plus grosses, celles qu’on voit dans les magazines, qui paraissent parfois inaccessibles mais qui nous laissent imaginer que ça peut nous arriver aussi….
C’est pour cela qu’en début de saison 2005 je décide de m’attaquer à une ballastière de 4-5 hectares peu fréquentée par les carpistes mais recelant de beaux poissons selon les informations que j’avais pu recueillir auprès de plusieurs pêcheurs au coup.
Motivé comme jamais à l’idée de sortir un de ces poissons, je m’étais fixé en tête un poste joliment marqué par un arbre mort en bordure dont quelques branches ressortaient à fleur d’eau. Qui plus est en début de saison, j’avais vu de mes yeux un des rares carpistes sortir un beau poisson qui à vue de nez devait faire dans les 12kg.
Je me disais donc pourquoi pas moi?


Arrivée au petit jour



J’avais malheureusement sous estimé ce plan d’eau ou peut-être surestimé mes possibilités…
Les capots s’enchaînaient les uns sur les autres et ma motivation décroissait en même temps.
Pourtant j’ai tout essayé (tout ce que je connais, mais je ne connais pas tout !) mais rien, rien n’y faisait. Ni les montages flottants ni les montages simples, ni les graines, ni mes bouillettes maison carnées et épicées.
Non vraiment la déception était grande et après une dizaine de journées de pêche infructueuses je me résignais donc alors que le mois de juin arrivait…..
Je continuais quand même à fréquenter cette ballastière pour y pêcher au coup et là une rencontre très intéressante allait faire basculer la réussite de mon côté.
Un ancien compétiteur de pêche au coup auquel j’avais raconté mes déceptions non pas amoureuses mais piscicoles m’indiquait que ses collègues carpistes pêchaient un poste sur cette même ballastière non pas en bordure mais en pleine eau et il me confirmait qu’il y avait un passage de carpes à 60 m du bord entre la pointe et « les galets ». Intéressant…
Malgré cela et ce peut-être à cause de mes capots passés je décide d’abandonner cette gravière maudite pour quelques temps, histoire d’aller voir ailleurs.
Puis vint le mois de septembre qui commence à sentir la fin de saison pour moi en tous cas.
Et là je décide que je n’avais pas dit mon dernier mot face à cette étendue d’eau et ses belles carpes….Je continuais à croire en mes chances et rêvais toujours de pouvoir tenir une « mémère »..


Cependant je change de stratégie et décide de préparer mon coup, de sonder ce fameux poste en pleine eau et d’amorcer une semaine avec des bouillettes très peu protéinées.
Après m’être levé à 6h20 du matin pour aller « cobrater » mon kilo de billes journalier pendant une semaine, le jour J était enfin là . J’y avais pensé toute la semaine. C’était maintenant ou jamais….
Mes montages (très simples) étaient prêts, tout était en ordre le vendredi soir et je trépignais d’impatience attendant le samedi matin.

6h00 : Mon ami Stéphane m’accompagne pour pêcher lui l’arbre mort « à l’arrache » puisqu’il ne reste que la matinée.

6h20 : Arrivée de nos 2 voitures sur place, tous les postes sont libres, ouf….

Il fait encore nuit et nous devons attendre 6h45 pour commencer à monter notre barda, rod-pod, cannes, etc.….

Je plaçe mes 3 cannes pas trop proches les unes des autres pour qu’une trop grande quantité de fil passe sous les barbillons des carpes méfiantes.


Tight lines



8h30 : le détecteur bippe plusieurs fois et le swinger remonte puis redescend d’un seul coup, une touche de retour (les pires pour moi), je me lève d’un seul bond prends la canne en main mouline tout ce que je peux puis croyant dans un premier temps avoir perdu le poisson je sens une masse au bout de la ligne. Par chance, le poisson s’était bien piqué, il est au bout. Stéphane et moi sommes déjà heureux d’avoir eu une touche mais il reste à sortir le poisson.


Record battu



Une miroir de 9 kg qui prendra une très belle pose pour la photo quelques instants plus tard.
Mon record de l’année était déjà battu et la malédiction venait d’être brisée !
Une douce euphorie s’empare de nous mais le meilleur restait à venir…
10h30 : même topo que pour la première touche le swinger monte puis redescend d’un seul coup mais cette fois-ci pas le temps de prendre la canne. Et le poisson ne s’est pas piqué, un coup de speed pour rien…
Puis plus rien, ni pendant midi, ni en début d’après midi.


Vladi surveille le déroulement des opérations



Je m’accorde donc un repos de quelques minutes en somnolant dans mon bedchair.
16h15 : biiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiip, je me réveille en sursaut dévale le talus de pierre pieds nus, prends ma canne du milieu en main et ferre, le poisson m’a déjà pris au moins 20 m de fil lors du départ. Mon fil se décale sur la droite et le poisson décide de longer la pointe à environ 60 mètres du bord, j’enjambe mon rod-pod et me décale en même temps que lui pour trouver la position idéale hors de mon coup et face au poisson. Je lui reprends 20m de fil facilement, puis 40 puis 50 et là le combat continue à 10-15m du bord. 10 minutes d’une lutte acharnée où dans un premier temps je ne vois pas le poisson.
Il finit par rendre les armes après plusieurs rushs impressionnants…C’est une commune, une belle commune.

Ca y est elle est dans l’épuisette, je pousse un YES de soulagement, désormais dans le tapis de réception je peux peser le poisson qui je le vois de suite dépasse allègrement les 10kg
Verdict : 14kg, mon record…. C’est un poisson en pleine forme qui s’est nourri pendant tout l’été et qui à cette époque atteint le top de sa forme. Une linéaire d’un mètre avec un petit bide, des couleurs orangées sur la caudale et des reflets d’écailles superbes. Je la rends à son élément le plus vite possible après la photo.


La récompense d’un combat acharné



Me voilà sur mon nuage….
Plus aucun poisson ne viendra me rendre visite mais je m’en moque, ma journée est faite et la malédiction est vaincue !

Publié par Francisco le 14-10-2005
Créé par Actorielweb